#musique : Enjeux de la limitation du niveau sonore des concerts

La limitation du niveau sonore des concerts, « un décret qui fait grand bruit »,  titrent les journaux, en référence aux grandes difficultés d’application rencontrées par cette loi qui aurait dû entrer en vigueur de manière définitive en octobre dernier.

Une préoccupation de santé publique

Trois ministères (Culture, Solidarités et Santé, et Transition écologique et solidaire) se sont alliés pour donner le jour au décret 2017-1244 du 7 août 2017. En effet, de récentes études montrent que plus de 9% de la population souffrirait de problèmes d’audition liés à une surexposition au bruit et notamment lors de concerts. Face à ce problème de santé publique, la loi prévoit d’abaisser la limite autorisée de « 105 dB à 102 décibels sur quinze minutes » pour ce qui est des fréquences médium et hautes (dBA), et à « 118 décibels sur quinze minutes », pour les fréquences dites basses (dBC).

Mais est-ce que cette loi peut réellement aider à faire baisser ces chiffres en constante augmentation ? N’est-il pas aussi de la responsabilité individuelle de se protéger en utilisant, par exemple des bouchons d’oreilles et en s’aménageant des plages de repos auditif suffisamment longues entre chaque exposition ?

Une menace pour la création musicale

Le premier lever de boucliers des professionnels du secteur musical concerne le respect de l’esthétique musicale. Abaisser de trois décibels le volume autorisé n’est pas sans conséquence sur le rendu d’un morceau et sur l’expérience des auditeurs. Les sons perdent alors en densité et certains artistes risquent de prendre cette restriction comme une attaque de leur création, voire la considérer comme une censure. L’importance des basses est primordiale notamment dans les concerts de musique électronique où les spectateurs ressentent les sons physiquement.  Il ne faut pas oublier qu’avant d’être du bruit, la musique est avant tout un art.

Une mise en œuvre compliquée

Mais les embûches rencontrées par de ce décret ne s’arrêtent pas là. D’autres types de problèmes, plus pragmatiques, sont aussi pointés du doigt. En effet, selon l’endroit où l’on mesure les basses dans une salle de concert, les fréquences peuvent varier et donc donner des mesures très hétérogènes. Il est, de plus, extrêmement difficile de mettre en place cette limitation sonore dans les manifestations en plein air où les contraintes liées aux éléments naturels (vents, humidité, nature du sols…) modifient en permanence la propagation des sons. L’autre point noir de cette loi soulevé par les professionnels du spectacle, est l’absence d’outils performants capables de mesurer les infrabasses (dBC). En outre, cette nouvelle mise aux normes, risque d’avoir un coût important qui pourrait mettre plus d’une salle en péril.

Vers une évolution du décret ?

Ainsi, même si cette loi semble partir d’une bonne volonté, appliquer la même législation aux salles de concerts fermées aussi bien qu’aux manifestations à ciel ouvert paraît irréalisable d’un point de vue technique. Un colloque national se tiendra ce mercredi 5 décembre 2018 afin d’échanger sur les enjeux de la mise en application d’une telle législation. Il est organisé par le Centre d’information du bruit, en partenariat avec le Ministère de la Culture, celui des Solidarités et de la Santé et celui de la Transition écologique et solidaire.

Cette rencontre sera peut-être l’occasion de mettre fin au dialogue de sourds entre l’État et les revendications du milieu du spectacle vivant.

Sources :

http://www.tplmusique.org/niveau-sonore-des-concerts-un-decret-qui-fait-du-bruit/

https://www.telerama.fr/musique/limitations-sonores-en-concert-un-decret-qui-fait-grand-bruit,n5904901.php

http://www.tplmusique.org/malika-seguineau-le-prodiss-demande-la-reouverture-dune-consultation-sur-le-decret-son/

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2017/8/7/SSAP1700132D/jo/texte

https://agi-son.org/news/colloque-national-du-cidb-sons-amplifies-la-nouvelle-reglementation-entre-en-scene-59

https://sons-amplifies.bruit.fr/images/pdf/journee-cidb-sons-amplifies-5-decembre-2018.pdf

 

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