La résurrection de l’American Cosmograph Toulouse : rencontre avec Jérémy Breta, codirigeant de la salle de cinéma rue Montardy

Mercredi 8 novembre, je me rends à l’American Cosmograph Toulouse avec l’ensemble de l’OP MACC où nous sommes attendus par Jérémy Breta. J’ai l’habitude de me rendre dans cette petite salle toulousaine entourée d’amis pour voir des films, mais aujourd’hui, je viens découvrir un lieu chargé d’histoire et échanger avec le nouveau directeur. Retour sur une expérience passionnante et émouvante.

L’aventure de Jérémy et Annie, deux anciens salariés de l’Utopia Toulouse, qui décident de racheter la salle de cinéma dans laquelle ils travaillaient

Dès qu’ils ont appris la mise en vente du fonds de commerce d’Utopia Toulouse, Jérémy Breta et Annie Mahot ont décidé de faire une proposition de rachat. Leur but était de poursuivre le travail entrepris par les équipes d’Utopia depuis une vingtaine d’année : « proposer un cinéma vivant, diversifié et ouvert sur le monde ». « Cela n’a pas été facile » avoue Jérémy. Même si les anciens dirigeants ont rapidement adhéré au projet des deux anciens salariés, il a fallu réunir les 1,2 millions d’euros nécessaires au rachat du fonds de commerce. Un pari osé mais qui se concrétise grâce à l’aide de plusieurs banques locales et de subventions de l’Etat venant en aide aux jeunes exploitants de cinéma. C’est ainsi que le 16 juin 2016, le cinéma rouvre ses portes et reprend son appellation d’origine : l’American Cosmograph Toulouse.

Une des plus vieilles salles de cinéma toulousaines qui fête cette année ces 110 ans d’existence

« Nous étions très attachés à notre salle et nous ne voulions pas qu’elle soit rachetée par des gros exploitants comme CGR » nous confie Jérémy. L’idée était au contraire de rester dans la lignée de l’histoire de la salle et de sa programmation éclectique. Originellement lieu de théâtre, dont il reste encore aujourd’hui le fond de salle – une superbe fresque d’inspiration antique –, l’endroit ne devient une salle de cinéma qu’en 1907. La salle est ensuite passée entre les mains de divers propriétaires et renommée à plusieurs reprises, pour être finalement rachetée en 1993 par Utopia. C’est en clin d’œil à son histoire, que les deux nouveaux dirigeants ont souhaité redonner son ancien nom à cette salle de cinéma, une des premières de la ville rose.

Une salle classée Art et Essai et labellisée Recherches et Découvertes, à la programmation riche et diversifiée

L’American Cosmograph Toulouse, même s’il ne possède que 3 salles de projection, renouvelle régulièrement sa programmation et propose tout au long de l’année des activités et événements originaux. Avec une quinzaine de films à l’affiche toutes les semaines dont au moins 3 nouveautés, la salle de cinéma souhaite présenter le meilleur de la diversité cinématographique. Elle propose également 2 à 3 soirées spéciales par semaine (conférences, débats, ciné-concerts, etc.), le lundi ou le jeudi pour attirer de nouveaux publics et augmenter son taux de remplissage, généralement plus bas ces jours-là. De nombreuses séances scolaires sont également organisées en partenariats avec les écoles de la région, en matinée grâce au large catalogue de films d’animations dont dispose le cinéma. En diversifiant ses activités, l’American Cosmograph souhaite développer de nouveaux publics. Jérémy nous explique d’ailleurs que l’objectif du cinéma est que « chaque film trouve son public. ». Sélectionnés en interne, les films projetés font la part belle au cinéma d’auteur. En effet, plus de 97% de la programmation est constituée par des films d’art et d’essai. Le cinéma européen est également mis à l’honneur, ce qui a valu à la salle d’être récompensée du label Europa Cinéma. Enfin chaque année, le cinéma participe aux moments cinématographiques forts de la région toulousaine en s’associant à plusieurs festivals comme Cinespaña, le Printemps Lesbien ou encore Cinélatino.

Les enjeux pour les nouveaux dirigeants de l’American Cosmograph

Malgré l’enthousiasme affiché de Jérémy, il nous avoue tout n’est pas toujours rose et que les difficultés économiques auxquelles doivent faire face les petites salles d’art et d’essai, sont bien réelles. « Nous savons déjà que nous serons déficitaires cette année, 2016 n’a pas été une année facile ». Lorsqu’on l’interroge sur les raisons de ces difficultés, Jérémy répond en plaisantant que c’est sans doute à cause de la météo, un facteur régulièrement mis en avant par les exploitants de cinéma. « Il a fait très beau avant les vacances, les gens sont moins allés au cinéma alors qu’il s’agit d’une très bonne période pour nous en règle générale. » A cela il ajoute que les sorties cinéma ont été assez « pauvres » cette année avec peu de grosses affiches. Enfin il y a surtout la concurrence très présente à Toulouse, notamment dans le centre-ville qui concentre 4 cinémas. Selon Jérémy, leur principal concurrent est l’ABC Toulouse, 2nde salle d’art et d’essai de la ville. Mais avec le changement de direction, les deux salles sont plus dans une optique de dialogue que de confrontation. « Nous sommes régulièrement en contact, nous discutons et nous ne cherchons pas à nous positionner par rapport à eux. L’important pour nous est d’offrir une bonne programmation. » Un an et demi après la reprise de l’Utopia Toulouse, Jérémy est confiant et souhaite développer encore plus sa programmation de l’American Cosmograph, en gardant l’esprit de l’Utopia. L’avenir nous dira si cette stratégie aura été payante.

SOURCES :
https://www.american-cosmograph.fr/
https://www.facebook.com/AmericanCosmograph/
http://www.cinemas-utopia.org/U-blog/toulouse/index.php?post/2016/06/10/La-r%C3%A9surrection-de-l-American-Cosmograph

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